Armentières (59) : Karim, sa femme et leurs enfants seront bientôt expulsés de leur « maison de cité », car le bail n’est pas à leurs noms

Ces locataires paient pourtant leur loyer de 400 euros par mois rubis sur l’ongle, depuis leur emménagement dans un logement à Armentières, dans le Nord (59), il y a quasiment deux ans. Le couple a également refait les peintures lui-même, carrelé la salle de bain et ajouté du parquet flottant dans les chambres. Un embellissement dont il ne tire aucune gratitude aujourd’hui puisque le bailleur social qui leur loue leur logement, Partenord, a mandaté un huissier pour qu’il quitte les lieux d’ici à fin octobre. «À leurs yeux, on est considérés comme des squatteurs, alors que l’on a même embelli le logement qui était dans un état lamentable à la mort de mon oncle, qui souffrait de handicap mental», s’attriste Cynthia.

De plus le logement colle parfaitement aux besoins de la famille. Il est doté de 4 chambres, une pour eux, une pour leur enfant de 17 ans, une autre pour leur autre enfant de 13 ans et une dernière pour leur dernier de 12 ans. Il est situé à proximité de la route que le couple suit pour aller au travail et non loin du collège où sont scolarisés les deux plus jeunes enfants. Comment des locataires aussi exemplaires peuvent-ils être condamnés à être expulsés? Le bail est la cause de leur malheur.

Un bail au nom de l’oncle décédé

Il ne porte pas le nom du couple mais celui de l’oncle de Cynthia, disparu en janvier 2022. Le couple n’est donc pas considéré comme locataire des lieux, mais comme hébergé par le locataire. Cynthia assure avoir tout mis en œuvre pour rentrer dans les clous depuis qu’elle a pris connaissance de leur expulsion prochaine. Elle a demandé le transfert de bail et est même disposée à payer un loyer plus élevé ou à acheter le logement si le bailleur se montre prêt à s’en séparer. D’autant plus qu’elle entretient un lien affectif avec cette maison, occupée par son oncle dont elle était très proche et auparavant habitée par sa grand-mère. «On se sent bien dans cette maison, on paye le loyer, insiste-t-elle. Je ne comprends pas pourquoi on doit partir», déclare-t-elle.

Que dit la loi dans ce type d’affaire? «Au terme de l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989, si le locataire décède, il peut y avoir un transfert du bail aux ayants-droits, dont la liste est précisée par le texte, explique au Figaro, Maître Pierre de Plater, avocat en droit immobilier. Il s’agit du conjoint survivant, des descendants qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès, des ascendants ou des personnes à charge, qui vivaient avec lui depuis au moins un an à la date du décès. En tout état de cause, si des personnes occupent les lieux sans avoir qualité d’ayant droit et sans être titulaire d’un bail conforme, ils sont occupants sans droit ni titre.» Affaire à suivre.

Partenord applique la loi

Pour le référent s’exprimant au nom de Partenord, « Madame X a eu le temps de s’organiser pour trouver une solution résidentielle, elle occupe illégalement notre logement depuis janvier 2022 et vous comprenez bien que nous ne pouvons pas régulariser une occupation sans droit ni titre ».

Du côté de Partenord, qui a pourtant empoché tous les loyers, hors de question pour l’instant de trouver une solution à l’amiable.

Du côté de Partenord, qui a pourtant empoché tous les loyers, hors de question pour l’instant de trouver une solution à l’amiable.

Et d’expliquer que Cynthia est arrivée dans le logement en décembre 2021, soit un mois avant le décès du titulaire du bail de ce logement. « Ne pouvant justifier de vivre depuis plus d’un an dans le logement, elle ne remplissait pas les conditions de l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989 pour un transfert de bail, précise-t-il. Plusieurs démarches ont été entreprises, sans succès, auprès de Mme X pour qu’elle quitte le logement. Madame a décidé de rester dans ce logement et est se faisant devenue occupante sans droit ni titre du logement. Partenord Habitat a donc dû intenter une action en justice pour pouvoir récupérer le logement. »

Avec la même froideur, il met un avant un jugement proclamé en novembre 2022 par le tribunal de Lille ayant constaté l’occupation sans droit ni titre, et condamné Mme X à payer une indemnité d’occupation de ce logement de 380 €, malgré les quelque 9 000 € empochés depuis, par le bailleur social. Le tribunal a aussi accordé un délai de sept mois pour quitter le logement. Et de trancher, « le délai étant passé, nous avons délivré un commandement de quitter les lieux à Madame X, conformément au jugement », conclut le bailleur social.

La Voix du Nord