Dix régions vont accueillir des migrants SDF venus d’Ile-de-France, ils seront ensuite répartis dans d’autres départements
Six questions sur ces centres en régions qui accueilleront des migrants et sans-abri d’Ile-de-France. Présentation de ce dispositif resté discret.
La mairie de Bruz s’inquiétait mardi d’un projet d’installation de centre d’accueil pour des personnes sans logement venant de Paris sur cette commune de 18 000 habitants, située au sud de Rennes. Ce projet de « sas d’accueil »
par la préfecture d’Ille-et-Vilaine doit voir le jour d’ici à septembre et s’inscrit dans un dispositif national d’accueil temporaire en régions. En quoi consiste ce dispositif qui vise à une meilleure répartition des migrants en France.

1 – Pourquoi des lieux d’accueil temporaires ?
Le gouvernement a mis en place un dispositif national d’accueil temporaire en régions pour y orienter les personnes migrantes qui vivent à la rue en Île de France. La création de ces « Sas d’hébergement temporaire »
doit ainsi permettre de mieux organiser leur accueil, d’accélérer le traitement de leur situation et d’apporter une réponse face au dispositif d’hébergement d’urgence en Île de France, qui est saturé.
Ainsi, depuis la mi-mars, le gouvernement a demandé aux préfets de toutes les régions, à l’exception des Hauts-de-France et de la Corse, de créer ces lieux temporaires. Depuis la mi-avril, sept centres ont déjà ouvert, a indiqué le ministère du Logement. En Bretagne, le centre d’accueil ouvrira dans un premier temps à Montgermont, dans la métropole de Rennes, fin mai ou début juin, avant d’être transféré à Bruz à la rentrée. En Auvergne Rhône-Alpes, un « Sas d’hébergement »
devrait ouvrir dans la métropole de Lyon.
Dorénavant, lors d’une opération de
« mise à l’abri », les personnes à la rue pourront se voir proposer une place dans l’un de ces sas en région. En revanche, elles n’auront pas vraiment le choix de la destination.Leur choix sera limité, car il n’y aura pas un flux continu d’orientation des personnes vers tous les sas, mais plutôt un système de rotation entre les sas, qui accueilleront les migrants à tour de rôle, indiquait le délégué interministériel à l’hébergement et à l’accès au logement (Dihal), Sylvain Mathieu, au site AEF info fin mars.
2 – Qui concerne-t-il ?
Ce dispositif concerne principalement les personnes migrantes, très nombreuses en Ile-de-France à vivre dans la rue ou en hébergement d’urgence. D’autres sans-abri pourront également en bénéficier.
D’après le secrétaire adjoint de la préfecture de région de Bretagne, lors d’une conférence de presse tenue mardi 23 mai, 400 personnes avaient déjà accepté de quitter l’Île-de-France et de rejoindre l’un des sept sas temporaires. Parmi elles, 200 ont bénéficié d’une place d’hébergement d’urgence. Selon Pascal Brice, le président de la Fédération des acteurs de la solidarité, ce dispositif est en théorie avant tout destiné aux personnes étrangères qui viennent d’arriver en France et qui vivent à la rue ou parfois dans des gymnases
.
3 – Comment fonctionnent ces sas ?
Ces « Sas d’hébergement temporaires »
sont gérés par des associations sélectionnées après un appel à projet. Pour le centre breton, c’est l’association Aurore (prenant déjà en charge de nombreuses personnes en situation précaire) qui a été choisie. Chacun des sites disposera de 50 places permettant d’accueillir les personnes pour une durée maximale de trois semaines. À leur arrivée, un examen de leur situation administrative et sanitaire est effectué et, en fonction de celle-ci, un hébergement leur est proposé. Pour cela, un nombre minimum d’intervenants doit être en poste : l’appel à projet lancé dans les Pyrénées-Atlantiques prévoit ainsi un encadrant (équivalent temps plein) pour quinze personnes hébergées, et une présence de l’association 24 heures sur 24.
4 – Après les sas, que deviennent les migrants ?
A l’issue d’une période de trois semaines dans les sas, ces personnes seront dirigées vers différentes structures d’accueil en fonction de leur situation. Pour les demandeurs d’asile, elles intégreront le dispositif national d’accueil. Celles en situation irrégulière seront orientées vers le DPAR (dispositif de préparation au retour). D’autres rejoindront les places d’hébergement d’urgence généralistes. Quant aux personnes qui sont le coup d’une obligation de quitter le territoire (OQTF), soit elles seront renvoyées dans leur pays, soit leur situation pourra être réexaminée. Mais combien quitteront ces sas pour revenir en région parisienne ? Un important travail d’information et d’accompagnement doit être mené auprès de ces personnes, dès le départ, avant même qu’elles ne quittent la région parisienne. Sans cela, elles repartiront au bout de 48 heures
, ne s’illusionne pas Pascal Brice, président de la fédération des acteurs de la solidarité.
5 – Un meilleur accueil des migrants sera-t-il ainsi assuré ?
Sur le principe, nous sommes d’accord avec ce dispositif
, ne cache pas Pascal Brice. Mais le président de la FAS, fédération qui regroupe 870 associations de solidarité, ajoute immédiatement : Sous certaines conditions…
Parmi celles-ci : ce dispositif doit avant tout s’adresser à des personnes qui viennent d’arriver en région parisienne et non à des personnes étrangères, présentes depuis un certain temps, dont les enfants par exemple seraient déjà scolarisés. Autre condition : qu’un examen sérieux du droit au séjour de chacune d’entre elles soit effectué. Certaines se retrouvent dans des situations très complexes.
Enfin, il faut suffisamment de places d’hébergement d’urgence, insiste Pascal Brice. Les autorités disent qu’elles vont créer 3 600 places pour ce dispositif, mais dans le même temps, elles envisagent d’en supprimer dix mille…
Il y a quelques jours, Olivier Klein, ministre délégué à la Ville et au Logement, assurait que 205 000 places sont ouvertes chaque soir en France
. Mais en septembre dernier, le gouvernement avait envisagé – dans le cadre de son projet de loi de finances – de supprimer 7 000 places (qui se seraient ajoutées aux 7 000 places supprimées au début de l’année 2022) … Avant d’y renoncer un mois plus tard, devant le tollé des associations et le nombre de personnes à la rue (330 000 selon la fondation Abbé Pierre). En octobre dernier, ce même ministre avait alors indiqué qu’il y aura finalement entre 197 000 et 198 000 places ouvertes en 2023…
6 – Ces sas régionaux ont-ils été ouverts en vue des JO ?
Cette répartition des migrants dans différents départements a-t-elle aussi été envisagée d’éviter les campements sauvages et de libérer des chambres d’hôtels où peuvent être logés des sans-abri, en vue de la Coupe du monde de rugby et des JO 2024 à Paris ? Matthieu Blet, le secrétaire général adjoint de la préfecture de Bretagne assure que non : Il y a beaucoup de gens à la rue en Ile-de-France. La solidarité nationale doit jouer.
La seule chose qui m’importe, c’est la manière dont les personnes, envoyées dans ces sas, seront accueillies
, balaie Pascal Brice.
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Révélé par Ouest-France, le projet d’accueil en Bretagne de sans-abri venus de la région parisienne sort peu à peu du flou. le projet d’accueil en Bretagne de sans-abri venus de la région parisienne sort peu à peu du flou. On a appris, mardi 23 mai, qu’un « sas d’hébergement temporaire » ouvrira fin mai-début juin dans un ancien hôtel à Montgermont, près de Rennes. Les sans-abri seront ensuite répartis dans les quatre départements bretons. Par la suite, le « SAS d’hébergement temporaire » pourrait être installé à Bruz. Qui n’en veut pas.
Il a confirmé que cinquante personnes « maximum » transiteront toutes les trois semaines par un lieu d’accueil temporaire dans la métropole rennaise avant d’être réparties dans les quatre départements bretons. Suivant leur situation, elles seront orientées vers des hébergements d’urgence ou des lieux d’accueil dédiés aux demandeurs d’asile et aux réfugiés.

Matthieu Blet, secrétaire général adjoint de la préfecture de région Bretagne, a apporté, mardi 23 mai 2023, des précisions sur le dispositif d’accueil en Bretagne de personnes sans-abri venant d’Ile-de-France.
Le premier « SAS d’hébergement temporaire » pour ces sans-abri venus d’Ile-de-France ouvrira dès la fin mai-début juin à Montgermont, dans la métropole rennaise. « Un ancien hôtel servira de solution intercalaire dans un premier temps, indique Matthieu Blet. Le maire est d’accord. » La gestion du lieu est confiée à un opérateur social, l’association Aurore, choisi après un appel d’offres. Celui-ci facturera à l’État un prix de journée. Des agents de la préfecture et de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (Ofii) travailleront avec les sans-abri sur leur « parcours logement ».
Une étude « un peu ancienne »
Dans un deuxième temps, c’est-à-dire à la rentrée, il est envisagé de transférer ce « SAS d’hébergement temporaire » à Bruz, également dans la métropole rennaise, sur du « foncier d’État », en l’occurrence un terrain appartenant à la SNCF. Il sera constitué de logements modulaires. C’est là que les choses se compliquent car la municipalité de Bruz s’est déclarée opposée à cette installation. Le maire de la commune, Philippe Salmon, se dit « désarçonné » par le projet. Il évoque notamment un terrain pollué « par des hydrocarbures et des métaux lourds », et dangereux car « jouxtant la voie ferrée ».« Il n’est pas rare qu’un projet de mise à l’abri se tienne sur une emprise SNCF », lui répond la préfecture de région.
Quant à la pollution mise en évidence par une étude, elle juge celle-ci « un peu ancienne et pas complètement documentée ». La préfecture de région précise qu’elle travaille en lien avec l’Agence régionale de santé (ARS) « afin de savoir s’il est possible de s’implanter sur ce lieu ». L’ARS a déjà fait des préconisations. Elle suggère ainsi de surélever les logements modulaires.Combien de temps ce dispositif d’accueil des sans-abri parisiens a-t-il vocation à fonctionner ? « Suivant le principe de l’annualité budgétaire, le financement court jusqu’au 31 décembre 2023 », répond Matthieu Blet. Et au-delà ? « Aujourd’hui, il n’y a pas de fin fixée. »
Pas de réunion prévue avec la population
Cette dispersion en province des sans-abri d’Ile-de-France a-t-elle un lien avec la perspective de la Coupe du monde de rugby cet automne, et des Jeux olympiques de Paris en 2024 ? La préfecture de région Bretagne assure que non. « C’est simplement dans la continuité du plan Logement d’abord lancé en 2018, affirme Matthieu Blet. Il y a beaucoup de gens à la rue en Ile-de-France. Beaucoup plus, proportionnellement, que dans les autres régions. La solidarité nationale doit jouer. »Dix régions françaises sont sollicitées. Le dispositif est déjà en place dans sept d’entre elles. « 400 personnes ont déjà accepté de quitter l’Ile-de-France », indique Matthieu Blet.Dans le contexte actuel, marqué par la démission du maire de Saint-Brevin, la préfecture de région envisage-t-elle de tenir des réunions d’information avec la population pour désamorcer d’éventuelles tensions ? « Nous avons informé les conseils municipaux », répond la préfecture de région.Ce mardi, l’Association des maires de France d’Ille-et-Vilaine (AMF 35) a affiché sa « solidarité à Philippe Salmon, maire de Bruz », par la voix de son vice-président, Henri Rault, maire de la commune de Chauvigné. Henri Rault tient également à préciser que « Bruz a toujours été comme la Bretagne une terre d’accueil, mais imposer l’installation d’un sas d’accueil pour des personnes vivant à la rue, qui plus est, sur un terrain pollué sans engagement ferme de l’État concernant l’accompagnement de ces personnes apparaît inadmissible ».