Europe : Pression maximale face à l’augmentation de l’immigration illégale

Alors que l’agence européenne de contrôle aux frontières annonce 330.000 passages illégaux en 2022, la France aura recensé plus de 130.000 demandeurs d’asile sur son sol.

La France s’apprête à annoncer ses propres chiffres sur les demandeurs d’asile qui ont bondi à plus de 130.000 en 2022. Une source gouvernementale évoque au Figaro un total de demandes «proche de 135.000». De son côté, l’agence européenne de contrôle aux frontières Frontex a choisi de révéler sans attendre son bilan pour l’année 2022 : «Environ 330.000 franchissements irréguliers de la frontière ont été détectés à la frontière extérieure de l’UE», selon elle. Il s’agit du «nombre le plus élevé depuis 2016». Une augmentation de 64 % par rapport à 2021.

Par ailleurs, si l’on en croit les chiffres de Frontex, le nombre de franchissements illégaux vers la Grande-Bretagne est largement supérieur aux 50.000 à 60.000 tentatives redoutées outre-Manche pour 2022. Dans la zone, principalement depuis la France, «plus de 71.000 franchissements irréguliers de la frontière ont été détectés», dont une large part de tentatives et de passages réussis. «Plus de 50 nationalités différentes ont été enregistrées dans la Manche, la plupart d’entre elles provenant du Moyen-Orient, d’Albanie et de la Corne de l’Afrique», précise l’agence européenne.

La pression migratoire qui pèse sur les pays de l’Union au sortir des années Covid est manifestement plus forte que prévu. Selon Frontex, la route des Balkans occidentaux est la plus empruntée de toutes, avec 145.600 passages détectés. Une hausse de 136% en un an ! Loin devant la route de la Méditerranée centrale qui aura vu les passages enregistrés monter à plus de 102.000 en 2022, soit une hausse de 51%.

Sur la route des Balkans, les Syriens, Afghans et Tunisiens représentaient ensemble 47 % des détections en 2022. «Le nombre de Syriens a pratiquement doublé pour atteindre 94.000», selon Frontex. «Les femmes représentaient moins d’une détection sur dix, tandis que la part des mineurs signalés a légèrement diminué pour atteindre environ 9 % de toutes les détections», note l’agence.

En 2022, «Frontex a mené une vingtaine d’opérations aux frontières extérieures de l’UE et au-delà, et déployé en moyenne 2000 agents du corps permanent». Mais le départ fracassant de l’ancien directeur exécutif de l’agence, Fabrice Leggeri, le 1er juillet dernier, laisse planer un doute sur la philosophie de cette institution. L’ex-patron français de l’agence s’en était ouvert dans sa lettre de démission, datée du 28 avril dernier : «Tout au long de ces deux dernières années, je peux constater que, discrètement mais efficacement, un récit envahit notre environnement. Ce récit raconte que le mandat principal de Frontex devrait être transformé en pratique en une sorte d’organe des droits fondamentaux contrôlant ce que les États membres font à leurs frontières extérieures», écrivait-il. Ce n’était pas la feuille de route initiale, selon lui.

Selon elle, sur la route de la Méditerranée centrale, «les Égyptiens, les Tunisiens et les Bangladais étaient les trois principales nationalités dans une année qui a vu le plus grand nombre d’arrivées dans cette région en provenance de Libye depuis 2017 et le plus grand nombre en provenance de Tunisie dans l’histoire récente». De nombreux Nigérians arrivent, de leur côté, par la Méditerranée orientale.

Ces chiffres excluent les quelque 13 millions de réfugiés ukrainiens recensés à leur entrée aux frontières terrestres extérieures de l’UE en provenance d’Ukraine et de Moldavie entre le 24 février 2022 et la fin de l’année. C’est dire le poids économique qui pèse, de manière globale, sur les épaules de l’UE. Pour Frontex, l’augmentation constante du nombre de franchissements irréguliers, démontre «la nécessité de disposer d’un corps de gardes-frontières et de gardes-côtes européens fort et efficace, avec Frontex en tant que soutien solide des États membres».

Concernant l’axe balkanique, principale voie de l’immigration illégale en Europe, la France a souhaité renforcer sa coopération avec les autres polices européennes. «Nous posons les bases d’échanges opérationnels pour frapper le plus en amont possible les réseaux qui alimentent les phénomènes migratoires jusqu’en Grande-Bretagne, où les Albanais, par exemple, sont devenus la première nationalité arrivant en small boat», expliquait, le 10 novembre dernier au Figaro, le nouveau directeur central de la police aux frontières, Fabrice Gardon.

Le 1er janvier dernier, la Croatie a rejoint l’Union européenne, entrant dans l’espace Schengen. Ce qui en fait de facto l’une des frontières extérieures de l’UE, avec 1200 kilomètres de bande terrestre – sans parler des côtes – à contrôler pour le compte de tous les États membres. Face au défi de l’immigration de masse, la coopération entre Paris, Frontex et Zagreb contre les réseaux de passeurs, est plus indispensable que jamais.

Le Figaro