Histoire mondiale des impôts : De l’Antiquité à nos jours
Ni manuel fiscal ni guide du contribuable, cet ouvrage explique par une approche claire et plaisante l’impôt, pourquoi il existe, pourquoi on y résiste, et dessine une nouvelle histoire de la construction de l’État.
À l’État tu contribueras ! Tel est le premier commandement gravé dans les tables de la loi de n’importe quel groupement humain constitué en société. On collecte les impôts sous une forme ou une autre depuis la nuit des temps. En Égypte à l’époque des pharaons, à Rome, en Chine, chez les Aztèques ou les Sumériens… Ce temps long de la taxation est décrit et analysé dans une passionnante Histoire mondiale des impôts. De l’Antiquité à nos jours, signée Éric Anceau et Jean-Luc Bordron.
Comme il est de bonne épistémologie de savoir de quoi on parle avant d’en parler, les auteurs définissent le terme : « L’impôt est un transfert de richesse, en argent, en service ou en biens matériels que les individus, les groupes humains ou les entreprises se voient contraints d’effectuer au profit d’une puissance supérieure qui peut être un État, des autorités locales ou encore des instances intermédiaires, comme un clergé, des juges, jadis des seigneurs. » Et de nous embarquer dans cette exploration de la notion à travers les âges et de par le monde.

Les impôts reflètent la personnalité des pays qui les lèvent, leur vision de la chose publique. Les pays anglo-saxons à la philosophie libérale goûtent peu l’idée de contraindre les citoyens plus fortunés à contribuer, à proportion de leur richesse et de manière progressive relativement à la hauteur de leurs revenus, à la solidarité avec d’autres citoyens censément libres, eux aussi, de gérer leur pauvreté comme ils l’entendent. D’où l’idée de plafonner la contribution, la fameuse flat tax. La France, animée depuis la Révolution par la passion égalitaire, n’est pas exempte de colère contre les dysfonctionnements bureaucratiques. Mais s’il est une chose qui fonctionne bien dans l’Hexagone, ce sont les rouages de la machine fiscale.
L’efficacité du levier des recettes publiques ne date pas d’hier ; un ambassadeur vénitien à la cour de François Ier remarquait la formidable aptitude de ce prince à les prélever et la non moins étonnante propension de ses sujets à y consentir (pas si réfractaires, ces Gaulois…). C’est sous Henri IV qu’à l’efficacité s’allie la créativité. Est créée une taxe surnommée « la paulette », d’après le secrétaire du roi Charles Paulet qui l’imagina : contre impôt, on pouvait transmettre son poste à son fils. Au concours Lépine des prélèvements obligatoires et des niches permettant d’échapper à la règle générale, la médaille revient au pays de Colbert : « 480 taxes et impôts, chaque création nouvelle ne se substituant qu’exceptionnellement à une plus ancienne […]. »
Gabelle, dîme, taille… le littéraire appréciera ici ces jolis mots de l’impôt, aujourd’hui remplacés par une inflation de sigles. Ce panorama ne néglige pas les frondes et les pamphlets antitaxes. Hugo s’était révolté contre l’impôt des portes et fenêtres. Au Moyen Âge, pour éviter de payer une taxe pour passer le Petit-Pont, à Paris, les saltimbanques faisaient danser leur singe en guise de spectacle et acquittement du droit de passage. De là l’expression : « payer en monnaie de singe ». Éric Anceau et Jean-Luc Bordron, eux, ne se payent pas de notre tête : qui se procurera leur livre en aura pour son argent.
On taxe tout, hormis l’air que nous respirons » assurait la marquise du Deffand. Dans ce livre inédit en son genre, Éric Anceau et Jean-Luc Bordron racontent l’histoire universelle et millénaire de l’impôt, de l’Égypte pharaonique aux paradis fiscaux contemporains en passant par la Chine impériale, la France de Louis XIV et l’Amérique de la prohibition. En mêlant récit grandiose et anecdotes savoureuses, les auteurs parviennent à dessiner une fresque aussi passionnante que divertissante d’un sujet omniprésent.
Sait-on, par exemple, que pour occidentaliser la Russie, Pierre le Grand voulait contraindre ses sujets à ne plus porter de barbes en créant un impôt sur la pilosité ? Sait-on, encore, que les guinguettes se trouvaient aux abords des villes pour échapper à la taxation ? Plus surprenant enfin, sait-on que les membres du groupe ABBA portaient des tenues excentriques parce qu’une loi suédoise permettait une réduction d’impôts sur les vêtements à condition de ne pas pouvoir les porter dans la vie de tous les jours ?”
Biographie des auteurs
Éric Anceau enseigne l’histoire contemporaine à Sorbonne Université. Il a publié vingt-huit ouvrages sur l’histoire française, européenne et mondiale, sur l’État, les pouvoirs et les sociétés dont Les Élites françaises des Lumières au grand confinement (2020) et Laïcité, un principe. De l’Antiquité au temps présent (2022) chez Passés composés.
Jean-Luc Bordron est inspecteur pédagogique régional honoraire en anglais. Il a publié une quinzaine d’ouvrages sur la civilisation anglo-saxonne, le cinéma, la langue anglaise et les expressions idiomatiques.