Pantin (93) : Charles Bameko, le pasteur sapologue de l’église évangéliste de la Bonne Semence, accusé d’avoir détourné 2 millions d’euros

Ses fidèles pensaient faire des dons pour des actions caritatives, mais l’argent aurait alimenté les comptes en banque de l’homme d’Église pour des achats personnels. Ce prédicateur de 52 ans, dont les sermons sont suivis par des milliers de fidèles, a été déféré ce jeudi avec sa compagne Mamie.

Habitué à déjouer les pièges de Satan — il en a même fait un livre —, Charles, prédicateur de 52 ans, n’a pourtant pas vu arriver les policiers mardi 19 septembre au matin à son domicile de Boissy-Saint-Léger (Val-de-Marne). Les enquêteurs du groupe économique et financier du SDPJ 94 l’ont tiré du lit avec sa compagne Mamie. Le couple a été placé en garde à vue pour abus de confiance, blanchiment et travail dissimulé depuis mars 2009.

Selon nos informations, les policiers pensent que l’argent offert par les fidèles — la coquette somme de deux millions d’euros —, n’était pas vraiment destiné à la « veuve et l’orphelin », comme l’assurait souvent l’homme d’Église sur les réseaux sociaux.

Pantin (Seine-Saint-Denis). L’évangéliste Charles Bameko, ici avec sa femme Mamie, a écrit plusieurs livres dont la vente devait bénéficier à la « veuve et l’orphelin », comme il l’assurait. Il est soupçonné d’en avoir profité à titre personnel.

Le parquet de Créteil (Val-de-Marne) a décidé ce jeudi de le renvoyer en janvier au tribunal correctionnel où il sera jugé pour abus de confiance, abus de biens sociaux et blanchiment. Sa compagne répondra, elle, de recel. En attendant l’audience, le couple a été placé sous contrôle judiciaire. Charles a pour « interdiction toute activité de prédication et toute activité en lien avec l’église de la Bonne Semence transmise », précise le ministère public.”

Sa chaîne YouTube compte 191 000 abonnés

Au départ, il y a pourtant un succès miraculeux. Celui dont est auréolé Charles. En quatrième de couverture du recueil de sermons qu’il a publié, il est présenté comme « le principal responsable de l’église La Bonne Semence près de Paris », le terme de semence étant évidemment employé dans son acception religieuse. Bref, il dirige une de ces églises évangéliques qui fleurissent dans la banlieue Est de Paris.

Les fidèles l’adorent. Il en a des centaines voire des milliers en Île-de-France mais aussi à l’étranger comme aux États-Unis. Il « œuvre à travers le média Radio Télévision Bostra sur YouTube et les réseaux sociaux, pour apporter le secours de Dieu », le décrit-on à sur sa télé. Sa chaîne YouTube compte 191 000 abonnés.

Les sermons du prédicateur sont diffusés en direct. Plus étonnant, des numéros de relevé d’identité bancaire de sa société défilent régulièrement à l’écran. Le plus souvent, c’est pour aider « la veuve et l’orphelin ». Cela fonctionne comme cela pendant des années. Jusqu’au jour où Tracfin, l’agence chargée de la lutte contre les circuits financiers clandestins, repère des choses pas très catholiques dans les comptes de la Bonne semence.

La brigade financière du Val-de-Marne prend le relais et lance l’examen approfondi des comptes en banque. Les policiers se rendent compte que l’argent des fidèles atterrissait soit sur le compte personnel du prédicateur soit sur celui de sa société. Une différence apparemment ténue puisqu’on lui reproche de piocher allégrement dans les deux.

Plus de 130 000 euros d’achats de chaussures

Qu’a-t-il fait avec ces deux millions ? Pour avoir une idée, les enquêteurs ont saisi des biens lui appartenant et évalués à plus de 1,2 million d’euros. Comme nous l’indique une source judiciaire, la liste est longue : des biens immobiliers estimés à 150 000 et 325 000 euros, des soldes de comptes bancaires pour 126 000 euros, des assurances-vies pour 322 000 euros, 20 000 euros en cash, 46 000 euros en devises étrangères, une voiture à 19 500 euros et 256 000 euros d’objets de luxe et de meubles. On apprend au passage que les chaussures sont le petit péché mignon du prédicateur qui en avait acheté pour plus de 130 000 euros.

Et alors ? C’était son argent après tout. Voilà en substance la ligne de défense de l’homme d’Église, qui se serait montré « calme » et « sympa » pendant la garde à vue. D’après lui, les fidèles lui ont donné des sous en toute bonne foi pour ses « bonnes actions ». En gros, il les délivrait du mal, donc il était récompensé. Les policiers ont vérifié auprès des donateurs. Et ils n’ont pas la même interprétation. Pour eux, il s’agissait, par exemple, de financer un orphelinat au Congo, pays dont est originaire l’accusé. Un beau geste que l’intéressé peinerait à prouver.

Selon le Conseil national des évangéliques de France (CNEF), qui regroupe 32 des 45 unions d’églises présentes dans le pays, on estime à plus de 1 million le nombre de personnes se déclarant évangéliques dans le pays, dont 750 000 pratiquants réguliers.

Le Parisien