Paris : Les punaises de lit, nouvelle bête noire des cinémas, « J’ai résilié mon abonnement tout de suite »
Nouveau coup dur pour les cinémas de la capitale. À peine remis de la crise sanitaire liée au Covid-19, les voilà confrontés au problème de punaises de lit qui a rejailli dans ces établissements depuis la fin du mois d’août. Des témoignages ont convergé sur les réseaux sociaux faisant état de piqûres au sein de plusieurs salles.
Il n’en fallait pas plus aux usagers pour se détourner des salles obscures. Les gérants de cinéma, eux, tentent de traiter le problème à la source et de se prémunir face au danger, avec une conséquence non négligeable sur leurs finances, en particulier pour les plus petites adresses.
Sophie, 20 ans, étudiante à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), venait tout juste de prendre un abonnement illimité aux cinémas UGC. Alors qu’elle avait prévu de profiter des grands écrans deux fois par semaine, la jeune femme va finalement préférer les salles indépendantes à celles des gros établissements commerciaux qui génèrent plus de fréquentation. « Je sortais de l’UGC des Halles (Paris Ier) le jour où j’ai entendu parler des invasions. J’ai eu peur car je suis étudiante, je ne peux pas me permettre de ramener des punaises de lit dans mon logement étant donné le coût des traitements.

« La première question que les clients nous posent »
Trop tôt pour mesurer l’impact de ce fléau sur la fréquentation des salles obscures. 150 213 entrées de plus qu’en 2022 ont d’ailleurs été enregistrés à Paris et dans le reste de l’Île-de-France sur la première période de septembre.
« Pour le moment, ça va… », tempère-t-on également dans un cinéma indépendant de la capitale. Lui vient de rouvrir après plusieurs semaines de fermeture estivale pour travaux, et le constat a la réouverture est sans appel : « La première question que les clients nous posent, c’est de savoir si on a des punaises de lit, se désole-t-on au sein de l’établissement. On avait déjà fait venir des chiens dépisteurs avant la fermeture mais on va devoir rappeler quelqu’un pour pouvoir dire clairement qu’on s’est fait tester. Mais tout ça a un coût », redoute le cinéma.
Les demandes de test en hausse
Chiens renifleurs, pose de fumigènes… Les sollicitations des entreprises spécialisées dans la détection et l’extermination des punaises de lit sont à la hausse dans les cinémas de la capitale. « Depuis plusieurs semaines, on reçoit énormément de requêtes, analyse le groupe DKM Experts. Nous sommes à six cinémas en cours de traitement, dont quatre en urgence », indique David Kato, le président du groupe.
Pour prendre les devants avant de se faire épingler sur les réseaux sociaux, « beaucoup de cinémas demandent des détections canines préventives », observe de son côté Romain Cottura, directeur commercial de Punaises Expert, installé dans la capitale. Mais pour les établissements, ces interventions sont coûteuses : compter 4 000 euros en moyenne pour tester une seule salle de 3 500 sièges. En cas de résultat positif aux punaises de lit, le traitement s’élève lui à 3 000 euros, et nécessite parfois un renouvellement.
Les actions préventives et les tests négatifs certifiés par certains cinémas ne suffisent pas, pour l’heure, à convaincre Sophie de reprendre le chemin des salles obscures. « Je sais que les cinémas se veulent rassurants mais c’est dans leur intérêt de dire qu’on ne court aucun risque… Je serais davantage rassurée en lisant des témoignages de personnes qui n’ont pas eu de problème. »
« Je ne vais plus du tout au cinéma »
Étudiant infirmier, Enzo, 21 ans, a préféré couper net. « Quand j’ai lu que le Pathé Alésia (XIVe) était touché, je n’ai pas réfléchi, j’ai résilié mon abonnement tout de suite, raconte celui qui possédait une carte de membre depuis deux ans. Aujourd’hui, je ne vais plus du tout au cinéma et ça me frustre car j’y allais au moins deux fois par mois », regrette le cinéphile.
La crainte d’Enzo dépasse son envie de découvrir de nouveaux films, et la Palme d’or du Festival de Cannes ne déroge pas à la règle. « Je n’y retournerai pas tant que je n’aurai pas l’assurance que toutes les mesures nécessaires ont été prises. Les punaises de lit, ça me répugne rien que d’y penser. »