Royaume-Uni : Des Britanniques, “pères de bébé migrant” en échange de milliers d’euros

Des hommes britanniques se sont fait passer pour des pères de bébés de femmes migrantes. Les migrantes devaient débourser plus de 11.000 euros pour inscrire le nom d’un Britannique sur l’acte de naissance de leur enfant. Avec cette fraude, les nouveau-nés obtenaient la nationalité britannique.

“Je suis un père avec un passeport britannique. Si vous êtes enceinte et que vous n’avez pas de père [pour le bébé], écrivez-moi”. “Je suis enceinte de quatre mois. J’ai désespérément besoin d’un papa citoyen [britannique] âgé de 25 à 45 ans”. Des messages de ce type fleurissent sur Facebook ces derniers mois.

En échange d’environ 11 000 euros, des Britanniques acceptent de s’enregistrer auprès de l’administration comme père d’un nouveau-né de mère étrangère. Sur le certificat de naissance du bébé, le nom d’un citoyen britannique est inscrit sans que celui-ci ne soit le géniteur. Cette pratique permet aux bébés né d’un parent étranger au Royaume-Uni de bénéficier automatiquement de la nationalité. La mère, en situation irrégulière, peut obtenir un titre de séjour pour vie privée et familiale.”

Un système “sophistiqué, difficile à surveiller”

Pour trouver les faux pères ou les femmes enceintes, les annonces fleurissent sur les réseaux sociaux. Elles peuvent paraître sur des groupes Facebook de communautés étrangères, comme par exemple sur une page dédiée aux demandeurs d’emploi vietnamiens.

Dans d’autres cas, des intermédiaires mettent en relation les mères et les faux pères, moyennant plusieurs centaines d’euros.

Un journaliste de la BBC s’est fait passer pour une femme enceinte à la recherche d’un père pour son futur enfant. Un intermédiaire lui a présenté un Britannique, en échange de 350 euros. Le citoyen anglais a quant à lui reçu près de 10 000 euros.

“Tous les hommes sont nés ici et ne se sont jamais enregistrés pour des bébés dans le passé”, assure l’intermédiaire au journaliste. “Je sais comment tout gérer. Ne vous souciez pas de vos papiers, vous en aurez très certainement après”.

D’après ces arnaqueurs, ce système décrit comme “très facile” par les organisateurs existe depuis des années et a profité à des milliers de migrantes.

Pour l’avocate en droit des étrangers, Ana Gonzalez, c’est une fraude “incroyablement élaborée”. “C’est sophistiqué, et très difficile à surveiller”, explique-t-elle à la BBC. Cette technique est aussi “la preuve du désespoir de ces femmes et des concessions qu’elles sont prêtes à faire pour être autorisées à rester au Royaume-Uni”, estime l’avocate.

Impunité des fraudeurs

Dès qu’elles ont eu connaissance de cette escroquerie, les autorités ont mis en place des mesures pour prévenir et détecter les fraudes. Un acte de naissance à lui seul n’est pas nécessairement une preuve suffisante de la paternité”, rappelle à la BBC le ministère de l’Intérieur. “Des preuves supplémentaires peuvent être demandées” en cas de doute.

Reste que selon l’avocat spécialiste de l’immigration, Harjap Bhangal, ces mesures ne suffisent pas. “Ce n’est pas une action ponctuelle qui va changer les choses. Ça concerne des milliers” de personnes. “Les escrocs savent qu’il n’y aura pas de poursuites alors ils continuent leur activité illégale”.

Cette impunité peut pousser l’escroquerie encore plus loin. Une migrante a affirmé à la chaine britannique qu’elle avait payé 11 000 euros à un homme pour qu’il devienne légalement le père de son enfant. Mais, la personne n’avait en réalité pas de passeport britannique. “Un jour seulement après avoir obtenu l’acte de naissance de mon bébé, j’ai découvert qu’il n’avait pas la nationalité. Je suis devenue folle”, se souvient cette femme. 

BBC